Entre les Corbières et le littoral méditerranéen (France, Aude), un couloir de quelques kilomètres de large s'offre aux oiseaux migrateurs pour franchir les Pyrénées par l'est. Lorsque les parcs éoliens arrivent au milieu des années 1990, la dispute pour l'espace et le vent atteint son zénith. L'irruption de cette technologie va cependant renouveler la façon dont les ornithologues (Ligue de Protection des Oiseaux) observent les oiseaux et négocient avec les développeurs la mise en site des parcs éoliens. Au lieu des traditionnels comptages de migrateurs, la méthode du micro-siting consiste à observer les oiseaux sur site et leur comportement de franchissement des éoliennes (bifurcation, traversée, survol, plongeon). Cette méthode, expérimentée par la LPO à l'occasion du renouvellement du parc éolien sur le plateau de Sigean-Port-la-Nouvelle, met en intelligence l'oiseau, le vent et le site. Elle estompe les frontières entre espèces et ouvre à des re-collections de comportements analogues entre eux. En suivant le travail de la LPO, cet article analyse la manière dont l'étude des mondes animaux renouvelle les catégories de la planification environnementale et conduit à des représentations de l'espace capables de mettre en partage les modes d'existence des oiseaux et d'orienter l'action des développeurs éoliens vers une prise en compte fine de la logique du site.