Ce travail de recherche porte sur la relation d’accompagnement de l’élève par le Conseiller Principal d’Education (CPE), qui occupe une place essentielle dans l’établissement scolaire pour assurer le suivi éducatif des élèves en veillant à leur bien-être (Bacro, Guimard & alii ; Marsollier, 2017 ; Mikaïloff, 2017). Le métier de CPE est une spécificité française : il exerce ses fonctions en tant que chef du service de vie scolaire en collège et lycée, et travaille étroitement avec les enseignants et les autres acteurs éducatifs, notamment médico-sociaux, de l’équipe éducative. Dans un contexte de cloisonnement des tâches éducatives et pédagogiques propre à l’histoire de l’enseignement scolaire du second degré (Focquenoy, 2018 ; Grimault-Leprince, 2014), et d’une division du travail éducatif (Tardif et Levasseur, 2010) liée à la démocratisation scolaire (Merle, 2017) et l’évolution des besoins des élèves, notre problématique considère la posture en tension du CPE soumis à des attentes contradictoires de l’institution. Entre perspectives normatives de socialisation des élèves et visées d’épanouissement des adolescents, comment s’exprime l’approche bienveillante du CPE durant l’entretien individuel qui constitue une activité centrale de son métier (Cadet, Causse et Roche, 2007) ? Quelle place peut-il donner à l’empathie (Gueguen, 2015) dans son action pédagogique ? Nous nous centrerons sur la posture (Vial, 2011) adoptée par le CPE en entretien éducatif par une approche compréhensive de son activité d’accompagnement (Cifali, Théberge & Bourassa, 2010 ; Lerbet-Sereni, 2013 ; Paul, 2009) de l’élève. L’analyse qualitative et quantitative des verbatim d’entretiens menés avec dix CPE, et les résultats d’une enquête complémentaire adressée aux professionnels de l’éducation à l’échelle d’une académie, nous permettent de mettre en évidence des gestes professionnels qui favorisent un dialogue éducatif soucieux de prendre en compte les besoins des élèves. La place de l’empathie et de la bienveillance dans cette relation d’accompagnement est questionnée en référence à l’éthique du care (Noddings, 1988 ; Paperman & Laugier, 2011) qui reconnaît la parole et la valeur d’autrui dans une attitude à la fois éthique et responsable (Prairat, 2012 ; Ricoeur, 2005). Cette étude ouvre des perspectives pour une analyse des gestes didactiques (Brière-Guenoun, 2017) du métier, en considérant la nature autopoïétique (Varela, 1989) de la relation d’accompagnement nouée par le CPE.